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Synthèse des recommandations de l’AOMI en néphrologie


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L’artériopathie oblitérante des membres inférieurs (AOMI) a de nombreux facteurs de risque et est reliée à un certain nombre de pathologies contribuant à des taux de complications plus élevés ainsi qu’à un risque de mortalité accrue. Le tabagisme constitue un des facteurs principaux de risque modifiables. Le diabète se situe en première place des facteurs de risque modifiables et est une comorbidité délétère. D’autres pathologies concomitantes sont également des facteurs aggravants de l’AOMI ; c’est le cas de l’insuffisance rénale chronique (IRC).

Synthese-des-recommandations-de-l-AOMI-pour-la-nephrologie

L’artériopathie oblitérante des membres inférieurs (AOMI) pourrait être considérée comme un mal moderne ; toutefois des preuves archéologiques ont été retrouvées, démontrant que cette pathologie existait également jadis [1]. Cependant l’augmentation des facteurs de risque modifiables contribue à la plus grande prévalence et à une sévérité accrue des symptômes de la maladie. Le tabagisme, l’hyperlipidémie, l’hypertension, un manque d’activité physique et un poids anormal en sont des exemples parlants [2-7]. Ces facteurs, associés au diabète et au vieillissement général de la population, sont les principaux responsables des 236,62 millions de patients artéritiques référencés en 2015 (contre seulement 202 millions en 2010), ainsi que des projections en hausse de prévalence de l’AOMI dans les années à venir [8, 9].

Un nombre croissant de patients implique naturellement une plus grande charge de travail pour les médecins et davantage de dépenses pour les systèmes de santé. De plus, un traitement complet de l’AOMI nécessite souvent une approche multidisciplinaire, non seulement du côté des médecins généralistes mais également du côté des cardiologues, des angiologues, des diabétologues (endocrinologues) ainsi que du côté des professionnels en plaies et cicatrisation et des néphrologues. Ces derniers connaissent généralement très bien les effets délétères de l’insuffisance rénale sur le système cardiovasculaire et, en particulier, son association avec la maladie coronarienne (MC). Cependant, il leur arrive de négliger souvent par manque d’informations les autres pathologies comme l’AOMI.

Les patients atteints d’IRC sont-ils plus à risque pour le développement de l’AOMI ?

Les maladies cardiovasculaires (MCV), notamment celles de type athéromateux, sont en général beaucoup plus fréquentes chez les insuffisants rénaux que chez les individus sans insuffisance rénale [10]. Mais cela va plus loin : les patients insuffisants rénaux sont beaucoup plus susceptibles de décéder de complications liées aux MCV, plutôt que d’atteindre l’insuffisance rénale terminale (IRT) [11, 12]. Une grande partie de ces complications est liée à l’AOMI. Les insuffisants rénaux présentent un risque plus de 2 fois plus élevé de développer une AOMI, par rapport à ceux dont les fonctions rénales sont normales [13]. Ceux qui ont ces deux pathologies présentent un grand risque d’infarctus du myocarde et d’AVC à court terme. Leur taux de mortalité est plus élevé par rapport aux individus uniquement atteints de l’une ou l’autre de ces deux maladies. Ils ont également des complications plus sévères et plus fréquentes après une revascularisation [14, 15].

Comme les diabétiques et les patients atteints de polyarthrite rhumatoïde, les insuffisants rénaux présentent fréquemment des artères incompressibles suite à une médiacalcose [16-18]. On associe ainsi, chez les patients hémodialysés, le diagnostic des artères incompressibles à une plus grande mortalité générale et cardiovasculaire. Du point de vue de l’AOMI, la présence de médiacalcose est susceptible de fausser le diagnostic si le praticien utilise une méthode d’examen basée sur l’indice de pression systolique (IPS) [18, 19].

Quelle que soit la méthode utilisée pour le diagnostic de l’AOMI, combinaison stylo Doppler + un sphygmomanomètre ou utilisation d’un appareil automatique de diagnostic oscillométrique-pléthysmographique (méthode plus simple et plus fiable), un IPS anormalement élevé n’a que peu de valeur prédictive pour l’AOMI. Ce résultat peut cependant indiquer un risque élevé d’infarctus du myocarde [19-22]. Dans ce cas, une évaluation de la pression au gros orteil (PGO) est alors préconisée dans la mesure où les artères des orteils sont rarement atteintes de calcification [23].

Malgré les preuves irréfutables de la collusion désastreuse de l’IRC et de l’AOMI, la majorité des grandes études épidémiologiques sur l’AOMI n’ont pas inclus l’IRC comme facteur de risque. En conséquence, elles n’ont pas documenté d’informations sur les niveaux de fonction rénale. Cela complique les estimations précises de la prévalence de l’AOMI chez les insuffisants rénaux [24-26]. Certaines études situent ce chiffre entre 23 et 25 %, tandis que d’autres s’appuient sur l’IPS en tant que critère de diagnostic et obtiennent des taux de prévalence bien plus élevés, jusqu’à 35 % [27-29]. De plus, des essais cliniques randomisés réalisés pour les thérapies de l’AOMI excluent souvent les patients souffrant d’insuffisance rénale sévère, malgré leur risque accru [29].

Les patients atteints d’IRC ou ceux déjà sous dialyse devraient être dépistés pour une AOMI puisque cela permet de redéfinir plus précisément leur risque cardiovasculaire. L’utilisation d’un questionnaire complet spécifiquement conçu pour les néphrologues se révèle être un allié précieux dans ce cas et il devrait être complété par une évaluation des IPS ou de la pression au gros orteil [30]. Cette dernière est reconnue comme étant plus précise que l’IPS chez les patients atteints d’IRT dans la mesure où la PGO offre une valeur diagnostique supplémentaire pour la prédiction de la mortalité chez les patients dialysés [31, 32]. Un diagnostic positif de l’AOMI réalisé sur la base de la PGO est souvent suivi par une angiographie par résonance magnétique afin d’évaluer l’étendue des lésions et des occlusions athéromateuses. Cette procédure diagnostique comporte cependant certains risques. Il a été prouvé que l’utilisation d’un produit de contraste pendant ces tests (notamment le gadolinium) est associée au développement de la fibrose néphrogénique systémique (FNS) chez les patients souffrant de dysfonction rénale sévère [33, 34].

En revanche, il y a un manque de preuves de qualité concernant les approches thérapeutiques adaptées au traitement de l’AOMI chez les patients insuffisants rénaux, ou plus particulièrement chez les dialysés. En règle générale, l’objectif est double : le traitement de l’AOMI et la réduction des facteurs de risque cardiovasculaire. Il est possible d’agir en réduisant les facteurs de risque secondaires (changement des habitudes de vie), tel que l’arrêt du tabagisme, qui améliore la capacité fonctionnelle des patients atteints d’AOMI. Il n’existe cependant pas de preuve que cela soit également le cas pour les individus souffrant d’IRC [35]. Les avantages du traitement par statines restent également à prouver pour le moment [36].

Les conséquences d’un traitement inadapté et/ou tardif de l’AOMI sont bien connues, tout comme les taux plus élevés de complications chez les insuffisants rénaux. Une AOMI non traitée peut se manifester à travers des ulcères artériels (ulcères/plaies ischémiques) qui peuvent rapidement progresser au stade de la gangrène et de l’ischémie critique des membres (ICM). Ce stade terminal de l’AOMI est associé à des taux d’amputation très élevés, situés entre 10 et 40 % dans une période de 6 mois après le diagnostic initial. Quant au taux de mortalité, il se situe aux environs de 20 % sous 6 mois, et autour de 50% 5 ans après que le diagnostic a été posé [37-41].

La revascularisation constitue souvent la seule option pour sauver le membre du patient. Cependant les résultats de ce type d’opération sont mitigés : chez les patients présentant des taux d’insuffisance rénale modérés, les taux de complications restent acceptables et le pronostic est relativement bon. Ce n’est cependant pas le cas pour les patients sous dialyse qui souffrent de complications souvent sévères. Leur taux d’amputation est particulièrement important (3 fois plus que pour le premier groupe) [42]. Néanmoins une chose est certaine : il reste encore beaucoup à faire pour parvenir à un traitement optimal de l’AOMI chez les individus souffrant d’insuffisance rénale.

Les patients insuffisants rénaux présentent des risques particulièrement élevés d’AOMI et ils souffrent de taux de complications et d’évènements indésirables à la fois plus fréquents et plus sévères. Il est ainsi fortement recommandé de réaliser un dépistage préventif dès le début de la dialyse.